Partage de la valeur et Participation dérogatoire : questions/réponses
27 juin 2024 - Juridique et fiscalité
La loi sur le partage de la valeur vise à généraliser les dispositifs de partage de la valeur au sein des entreprises. Une des mesures de la loi encourage le développement de la participation dans les entreprises qui ne sont pas soumises à l’obligation de mise en place d’un dispositif de participation, à titre expérimental pendant 5 ans.
Cette expérimentation permet d’ouvrir aux entreprises de moins de 50 salariés qui souhaiteraient mettre en place un dispositif de participation, la possibilité de négocier par accord de branche ou d’entreprise des formules dérogatoires à la formule légale de participation, pouvant mener à un résultat plus favorable (ou moins favorable) que celui obtenu avec la formule légale. Une négociation devra être ouverte dans chaque branche d’ici le 30 juin 2024.
Le Ministère du travail a publié un questions/réponses sur le sujet, que nous retranscrivons pour vous.
Participation dérogatoire : questions/réponses
Apport de la loi
Afin d’encourager et de faciliter le développement de la participation dans les petites et moyennes entreprises, les partenaires sociaux ont choisi de simplifier le dispositif en levant la référence à la formule légale du Code du travail.
Grâce à cette expérimentation, une entreprise faisant le choix d’une formule dérogeant à la formule légale n’a plus besoin de comparer son résultat à celui de la formule légale et n’est plus dans l’obligation de verser à minima le résultat de cette dernière.
La formule dérogatoire peut avoir un résultat moins disant comme un résultat mieux disant que celui de la formule légale.
Toutefois, cette simplification n’a pas pour effet de supprimer les autres effets des dispositions relatives à la participation notamment l’obligation de respecter l’un des quatre plafonds prévus à l’article L. 3324-2 en cas de formule dérogatoire pour bénéficier des exonérations sociales et fiscales ou la mise en place d’un plan d’épargne entreprise ou interentreprises.
Entreprises concernées par la Participation dérogatoire
Les entreprises qui ne sont pas tenues de mettre en application un régime de participation mais qui peuvent s’y soumettre volontairement.
Il s’agit donc :
- Des entreprises de moins de 50 salariés,
- Des entreprises d’au moins 50 salariés :
- qui bénéficient du moratoire de 5 ans, c’est-à-dire qui ont un effectif supérieur à 50 salariés mais pas depuis au moins cinq années consécutives,
- ou dont le bénéfice net fiscal est inexistant ou insuffisant pour générer une réserve spéciale de participation (RSP) selon la formule légale,
- ou qui bénéficient, à la date d’entrée en vigueur de la loi, du report de trois ans de la mise en place de la participation en cas de couverture par un accord d’intéressement, le temps du report,
- ou nouvelles dont la création ne résulte pas d'une fusion, totale ou partielle, d'entreprises préexistantes qui bénéficient quant à elles d’un report de deux ans.
Pour rappel, l’effectif est calculé selon les modalités de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. Il s’agit de l’effectif salarié annuel de l’entreprise, correspondant à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’année civile précédente.
L’entreprise est assujettie à la participation à compter du premier exercice ouvert postérieurement à une période de cinq années civiles consécutives où le seuil de 50 salariés a été atteint ou dépassé.
NON. Une unité économique et sociale (UES) d'au moins 50 salariés et dégageant un bénéfice suffisant, a l'obligation de mettre en place un accord de participation au profit de l'ensemble de ses salariés, soit par la conclusion d'un accord unique de type accord de groupe, soit par la conclusion d'accords séparés, afin que les salariés de chacune des structures constituant l'UES soient couverts.
Une entreprise de moins de 50 salariés faisant partie d’une UES assujettie à la participation est de fait dans l’obligation de mettre en place un dispositif de participation et ne peut donc pas prétendre au dispositif expérimental dérogatoire.
Les entreprises qui sont tenues de mettre en place de la participation en raison de leur effectif mais qui en sont dispensées en raison d’un bénéfice net fiscal insuffisant entrent également dans la définition de l’article L. 3323- 6 du code du travail et donc dans l’expérimentation.
Toutefois, cette expérimentation ne les exonérera pas de surveiller leur bénéfice net fiscal tous les ans pour le cas où il deviendrait suffisant pour calculer une réserve spéciale de participation selon la formule légale.
Période d'application de l'expérimentation de la Participation dérogatoire
Dès la promulgation de la loi.
Par conséquent, elles peuvent conclure cet accord au titre de leur premier exercice clos à compter du 30 novembre 2023.
Par exemple une entreprise qui clôture son exercice le 31 décembre 2023 peut mettre en place ce dispositif dérogatoire à compter du 1er janvier 2023.
NON. L’expérimentation est d’une durée de 5 ans à compter de la date de sa promulgation. Elle se termine donc le 29 novembre 2028.
En conséquence, la réserve spéciale de participation ne pouvant se calculer que par exercice entier, le dernier exercice d’application de l’expérimentation doit se clôturer au plus tard le 29 novembre 2028.
Par exemple, pour une entreprise qui clôture son exercice le 31 décembre, son dernier exercice d’application de cette expérimentation sera celui ouvert du 1er janvier 2027 au 31 décembre 2027.
Modalités de mise en place de la Participation dérogatoire
Ce dispositif expérimental est mis en place au sein de l’entreprise soit par :
- adhésion à un accord de branche agréé ou si l’accord de branche le prévoit, par décision unilatérale de l’employeur;
- accord propre à l’entreprise conclu selon les modalités de l’article L. 3322-6 du code du travail (avec les délégués syndicaux, un ou plusieurs salariés mandatés par une organisation syndicale représentative au sein de l’entreprise, le comité social et économique ou projet ratifié à la majorité des 2/3 des salariés).
NON. Ce dispositif pouvant avoir un résultat inférieur à la formule légale, les partenaires sociaux ont privilégié la voie de la négociation aboutissant à un accord.
Les dispositions de l’article L. 3323-6 du code du travail (participation volontaire) en cas d’échec des négociations ne sont donc pas applicables pour la mise en place de ce dispositif expérimental.
NON. Si l’entreprise dispose déjà d’un accord de participation, elle doit le dénoncer afin de négocier un nouvel accord dérogeant à la règle des avantages consentis dont l’échéance ne pourra aller au-delà du 29 novembre 2028.
Pour rappel, afin de préserver le caractère aléatoire du dispositif, un accord de participation ne peut être dénoncé avant la clôture d'au moins un exercice dont les résultats n'étaient ni connus ni prévisibles à la date de sa conclusion. Les résultats d'un exercice sont considérés comme prévisibles lorsque la moitié de l'exercice s'est écoulée.
Si par exemple, une entreprise a un exercice à l’année civile et a conclu le 30 septembre 2023 un accord de participation pour une durée indéterminée et qu’elle souhaite négocier un nouvel accord de participation dérogeant à la règle d’équivalence des avantages consentis aux salariés, elle ne pourra pas dénoncer l’accord en vigueur avant le 1er janvier 2025.
En effet, à la date de conclusion de l’accord, les résultats 2023 sont considérés comme prévisibles et connus. Elle devra attendre que l’exercice 2024 soit terminé pour dénoncer son accord.
Les accords de participation volontaire doivent également être conclus avant l'expiration du délai d'un an suivant la clôture de l'exercice au titre duquel sont nés les droits des salariés.
Toutefois lorsque l'accord prévoit une dérogation au mode de calcul de la réserve spéciale de participation, le respect du caractère aléatoire de la participation impose que ce mode de calcul dérogatoire s'applique à au moins un exercice dont les résultats n'étaient ni connus ni prévisibles au moment de la signature de l'accord (les résultats sont considérés comme prévisibles dès le premier jour du deuxième semestre de l'exercice).
Par exemple, si une entreprise a un exercice à l’année civile et souhaite mettre en place un accord de participation dérogatoire à compter de l’exercice 2023, cet accord devra s’appliquer à minima aux exercices 2023 et 2024 s’il est conclu d’ici le 30 juin 2024 (les résultats ne sont pas considérés comme prévisibles avant le 1er juillet 2024 pour l’année 2024).
Si l’accord est conclu à compter du 1er juillet 2024, il devra s’appliquer à minima aux exercices 2023, 2024 et 2025 car les résultats de l’exercice 2024 sont considérés comme prévisibles au moment de sa conclusion.
Négociation de branche & Participation dérogatoire
Les branches professionnelles doivent ouvrir une négociation en vue de la mise en place de ce régime de participation expérimental d’ici le 30 juin 2024.
À défaut d'initiative de la partie patronale avant cette date, la négociation s'engage dans un délai de quinze jours à compter de la demande d'une organisation de salariés représentative dans la branche.
Pour les branches professionnelles placées en commission mixte paritaire, les présidents de commission pourront proposer, avec l’accord des partenaires sociaux, que cette question soit mise à l’ordre du jour.
En deçà d’un effectif de 50 salariés, l’employeur peut mettre en place le dispositif de participation de branche par décision unilatérale si cet accord le prévoit. Pour cela il doit adhérer à l’accord de participation négocié au niveau de la branche professionnelle et agréé par le ministère du travail lui fournissant un dispositif clef en main, c’est-à-dire ne comportant que des options dont le contenu est prédéfini, sans adaptation possible.
À partir de 50 salariés, l’adhésion s’effectue nécessairement par un accord conclu selon les modalités prévues par l’article L.3322-6 du code du travail.
Le bénéfice des exonérations fiscales et sociales est sécurisé pour les entreprises qui adhèrent à cet accord de branche dès le dépôt de l’accord ou de la décision d’adhésion et pour la durée de cette adhésion. Seul un contrôle des formalités de dépôt de ces adhésions sur la plateforme de téléprocédure du ministère du travail sera effectué par les DDETS.
Contrairement aux autres dispositions des accords de branche, les stipulations relevant de l’épargne salariale ne sont pas automatiquement applicables aux entreprises, même lorsque l’accord de branche est étendu.
Si les entreprises souhaitent s’en saisir, elles peuvent adhérer :
- par décision unilatérale de l’employeur, pour les entreprises de moins de 50 salariés ;
- par conclusion d’un accord d’entreprise, selon les modalités spécifiques à la participation, pour toutes les entreprises.
Pour rappel, conformément à l’article L. 3322-9 du code du travail, l’adhésion à un accord de branche par décision unilatérale de l’employeur s’inscrit dans le cadre de l’article L. 2232-10-1 du même code. Dans ce cas l’effectif salarié est calculé selon les articles L. 1111-2 et L. 1251-54 du code du travail.
OUI.
Les articles L. 2222-1 et L. 2232-5 du code du travail prévoient qu’un accord de branche détermine son champ d’application à la fois territorialement qui peut être national, régional ou local et professionnellement défini en termes d’activités économiques.
L’article L.2232-10-1 dispose quant à lui qu’un accord peut comporter, le cas échéant sous forme d'accord type indiquant les différents choix laissés à l'employeur, des stipulations spécifiques pour les entreprises de moins de cinquante salariés.
Le champ d’application d’un accord de branche peut donc être réduit en fonction de la taille des entreprises entrant dans son champ d’application territorial et professionnel.
Divers
NON.
L'article L. 3333-5 CT prévoit que le plan d’épargne interentreprises peut, si son règlement prévoit de recueillir les sommes issues de la participation, comporter un accord de participation à destination des entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas assujetties directement à la participation. Dans ce cas, les entreprises concernées sont dispensées de conclure un accord de participation et peuvent décider unilatéralement d'appliquer la participation financière dans leur entreprise.
Toutefois le dispositif expérimental dérogeant à la règle des avantages consentis aux salariés pouvant avoir un résultat inférieur à la formule légale, les partenaires sociaux ont privilégié la voie de la négociation collective aboutissant à un accord d’entreprise sauf en cas d’adhésion à un accord-type de participation de branche.
NON.
Contrairement à l’intéressement qui est pensé au plus près de l’entreprise, la participation est entièrement attachée aux résultats. Il s’agit d’un droit concédé aux salariés de recevoir une part des bénéfices de l’entreprise.
L’expérimentation en supprimant la règle des avantages consentis aux salariés n’en change pas l’esprit. La formule de calcul doit donc reposer sur des résultats financiers et non des objectifs liés à la productivité.
La formule le calcul peut par exemple reposer sur le bénéfice net, le résultat courant avant impôts, le résultat d’exploitation ou l’excédent brut d’exploitation de l’entreprise.